samedi 21 mai 2011

La carastrophe de Fukushima laisse la France fidèle au nucléaire civil

A Fukushima, un tremblement de terre de magnitude 9, suivi d'un tsunami géant mettent hors service 4 réacteurs. Un coup dur pour le nucléaire civil, revigoré par la lutte contre le réchauffement climatique. Sauf en France, dédiée à l'énergie nucléaire depuis près de 50 ans.


Fukushima : 4 réacteurs à démanteler

La compagnie Tepco (Tokyo Electric Power Company), exploitant de la centrale nucléaire japonaise de Fukushima-Daiichi, a décidé de démanteler les quatre premiers réacteurs. Rappelons que cœur radioactif de 3 d’entre eux a fondu, ce qui rappelle le désastre de Tchernobyl. Tepco a suspendu par ailleurs la construction des réacteurs n°7 et n°8 de cette centrale en bord de mer. Logique.

Ce démantèlement qui coûtera fort cher et durera fort longtemps ne sera pas une partie de plaisir en matière de sécurité et de financement.

Tepco envoie des techniciens dans l'enceinte des réacteurs de Fukushima

Des employés de Tepco ont pu pénétrer pour la première fois dans l'enceinte du réacteur 3  de Fukushima, dernier des 3 endommagés à être inexploré jusque-là.. Au programme précédent : fusion du cœur, une explosion due à une accumulation d'hydrogène et destruction du toit. Les deux employés de Tepco ayant pénétré dans l'enceinte du réacteur ont été exposés en 10 minutes à une dose de radiations inférieure à 3 millisieverts. Très inférieure à la norme de 250 millisieverts la fixée par le Gouvernement japonais pour la durée des opérations.

Mercredi, quatre de leurs collègues avaient exploré 10 minutes le bâtiment du réacteur n° 2.Ils prenaient la relève de deux robots hostiles à la radioactivité. Début mai, des ouvriers avaient pénétré pour la première fois dans le bâtiment d'un réacteur, le n° 1.

Bilan catastrophique, ambitions modestes et vertueuses

Le bilan actuel au sein de Fukushima est encore pire que prévu. Le combustible nucléaire des réacteurs 1, 2 et 3 a vraisemblablement fondu, faute d'avoir été immergés plusieurs heures durant, la catastrophe ayant anéanti les systèmes de refroidissement. 

Les objectifs de Tepco demeurent modestes : maintenir durablement à basse température les réacteurs et les piscines de désactivation, contrôler les rejets radioactifs et faire en sorte que les personnes évacuées des environs de la centrale puissent regagner leur domicile le plus tôt possible. « Tôt »  étant une notion bien relative.

Zone interdite de Fukushima : deux heures pour récupérer des affaires

Pour la première fois, des habitants de la zone interdite de 20 kilomètres autour de la centrale nucléaire de Fukushima, du village de Kawauchi, ont pu retourner quelques heures dans leur village irradié. 

Rappelons qu’au total, 80 000 personnes ont été évacuées le 12 mars au lendemain du séisme. Comme quoi le système capitaliste japonais est plus réactif que le système soviétique à Tchernobyl, dans lequel le Comité central du Parti communiste lui-même devait trouver quelle était la vérité sur place.

Chaque résident-visiteur a dû enfiler une combinaison de protection radiologique, un masque et des gants. Il était muni d’un dosimètre et d’un talkie-walkie.

Depuis le 21 avril, il est impossible de se rendre dans cette zone librement. Les routes sont barrées, surveillées par la police. Des mesures de blocage qui dureront au moins jusqu’à la fin de l’année.

Tepco conclut son exercice fiscal sur des pertes abyssales

Autre victime de la catastrophe nucléaire : la compagnie Tepco, avec une perte net record de 11 milliards d'euros. Autrement dit, le pire déficit jamais enregistré par un groupe industriel japonais. 

L'avenir n’est donc pas très prometteur pour Tepco, qui a requis l’aide de l’Etat japonais, à hauteur de 8,7 milliards d'euros. L'État japonais a réagi rapidement, mettant Tepco sous son contrôle et s’engageant dans me dédommagement des 85 000 victimes. Soit un coût prévisible (suivant la presse locale, il est vrai) entre 25 et 43 milliards d’euros. Pour un état déjà surrendetté...

Le désastre nucléaire civil japonais influence-t-il le nucléaire français ?

Quelle influence aurait la catastrophe nucléaire japonaise dans la patrie du nucléaire civil, je veux dire la France ? A Flamanville par exemple, dans le Cotentin, région dédiée depuis longtemps consacré au nucléaire. Avec actuellement 3 000 travailleurs consacrés à la construction d’un EPR, complément de deux centrales classiques. Et inquiète du retour d'une tendance anti-nucléaire.


Suite au drame spectaculaire de Fukushima, ce n’est pas l’éventuelle dangerosité du nucléaire civil qui fait tachycardiser les milliers de  salariés du chantier, mais la crainte d'un moratoire, d’un éventuel arrêt du chantier. Crainte de l’ensemble de la population du bassin du Cotentin, à laquelle l'industrie de l'atome fournit 10 000 emplois directs et indirects. De l'usine de retraitement de la Hague aux centrales du bord de mer. "Sans le nucléaire, on deviendrait une zone sinistrée", résume Michel Laurent, président de la commission locale d'information (CLI) de Flamanville. Voilà...


Améliorer la sûreté en France et en Europe : jusqu'où, à quel coût ?

Le cahier des charges annoncé par l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN) française la semaine dernière fait déjà l'objet de critiques. S'il impose un examen, d'ici au 15 septembre, des conséquences de phénomènes naturels extrêmes sur les 150 installations nationales (dont les 58 réacteurs et l'EPR de Flamanville en construction), il n'exige pas la prise en compte d'actes terroristes. Egalement dommageable : pour des raisons de calendrier, la base sera constituée d'études existantes, fournies par EDF. Bon...

A Bruxelles, les responsables tardent à trouver un terrain d'entente sur les critères adéquats pour passer au crible les centrales. Le commissaire européen à l'énergie, Günther Oettinger, peine à imposer ses vues : inclure le risque terroriste ou une chute d'avion.

Si la France et l'Europe concluaient à un nécessaire renfort de l'EPR, son coût - déjà estimé à plus de 5 milliards d'euros - pourrait alors devenir prohibitif.

Quoi qu'il en soit, la catastrophe à long terme qui a frappé la centrale de Fukushima laissera des traces sur le développement du nucléaire civil dans le monde entier.


Nucléaire civil : une institution immémorable en France


Le développement prioritaire d’une industrie d’énergie nucléaire en France est un acquis des années 60-70, dans lequel syndicats, partis politiques de gauche et de droite et grands corps de l’Etat se sont entendus. Actuellement producteur de 80% de l'énergie électrique en France.


Bilan : 58 réacteurs , 1 100 sites renfermant des déchets nucléaires, 200 000 emplois  et 10 à 15 milliards d'euros de chiffre d'affaires annuels.Et un kilowattheure pour l’instant pas trop cher (mais ça pourrait changer). 

Et aussi une perspective de coût de démontage des centrales un brin inquiétante et non chiffrée.


Les Français s'écartent du nucléaire, par la pensée 

Selon un sondage Ifop publié début juin, une large majorité de Français (77%) souhaite désormais l'arrêt sur 25 ou 30 ans maxi du programme nucléaire.