dimanche 27 avril 2008

Aide au développement : au bonheur des dames

Les femmes représentent plus de la moitié de la population et du potentiel humain mondiaux. En de nombreux pays, elles sont pourtant marginalisées, d'où le gaspillage de leur contribution économique et sociale. Cette défaillance est analysée dans un rapport de l'OCDE : "Genre sexuel et Développement durable" qui explore les rôles sociaux respectifs des hommes et des femmes, leur historique et leurs conséquences sur le développement. Ainsi, en matière de lutte contre la pauvreté, la discrimination envers les femmes se révèle préjudiciable à l'ensemble des pays concernés. D'où une nouvelle orientation : cibler de plus en plus sur elles les aides au développement.


Les femmes forment plus de 70% de la partie pauvre de la population mondiale, du fait de leur accès inégal aux opportunités économiques dans les pays développés et en voix de développement. Dans les pays "en développement", elles remplissent de multiples tâches "bénévoles". Filles et femmes peuvent ainsi passer jusqu'à 5 heures par jour à ramener eau et bois de chauffage, et 4 heures à préparer les repas. Leurs aptitudes dans ces tâches est réduite par leur accès limité à l'éducation, aux soins médicaux et autres services, voire à la nourriture. De ce fait, dans de nombreux pays, leur espérance de vie est inférieure à celle des hommes, ce qui contredit la tendance biologique.

Une inégalité économique et sociale ancrée dans les "traditions"

Les femmes qui travaillent hors de leur foyer ne s'en sortent pas beaucoup mieux. En Asie du Sud-Est, elles représentent 90% de la force de travail dans la riziculture. En Afrique, elles constituent les 2/3 des travailleurs de l'horticulture. En résumé, elles sont affectées aux travaux répétitifs à bas salaire, tels que la confection, la production et le conditionnement de produits alimentaires et de biens pour la maison. Elles bénéficient rarement des droits du travail les plus élémentaires.

Les fameuses "traditions", coutumes et normes sociales convergent avec un bel ensemble vers une inégalité au détriment des femmes en termes de disposition et de contrôle du capital et des ressources, d'héritage, de propriété de liberté et de prise de décision (incluant leur propre santé en matière de procréation).


Les femmes, meilleur investissement social

Et pourtant, souligne le rapport, le retour sur investissement est plus important lorsque celui-ci est affecté aux femmes plutôt qu'aux hommes. Le produit National Brut est nettement plus bas dans les pays où les femmes reçoivent une éducation moindre que les hommes. Des études en Afrique révèlent que l'accès des filles à l'éducation primaire augmente le niveau des récoltes de 20%. Dans le même ordre d'idée, un accès égal au capital pour les femmes augmente la production agricole de 15%.

D'après une étude de la Banque mondiale en 2001, les femmes consacrent une plus large part de leur revenu à la nourriture, les soins et l'éducation. Subventionner les femmes plutôt que les hommes est donc bénéfique à la famille !

Une aide au développement plus "sexuée"

En 2006, la Banque concluait qu'investir dans l'éducation, la santé et l'accès à la qualification et à l'emploi des femmes et des filles aurait un effet multiplicateur sur la productivité, l'efficience et le caractère durable de la croissance économique dans les pays émergents.

De ce fait, l'assistance au développement fournie par l'OCDE adopte de plus en plus une approche "sexuée". Ses "gender projects" ont connu une croissance moyenne de 28% ces dernières années (avec une variation de 1 à 82% suivant les pays concernés). Plus de 40% de l'aide à l'éducation de base et à la santé est orientée vers les femmes;

Les institutions mondiales ont donc réagi à cette inégalité préjudiciable aux femmes et à ses effets négatifs sur le niveau de vie des populations. Ce raisonnement peut malheureusement être inversé : chaque fois que la situation économique ou politique se dégrade, les femmes et les enfants sont les premiers à en payer le prix, en termes d'éducation, de santé et de droits.

Thierry Follain

Cet article peut être reproduit après consentement de l'auteur.

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